Faudrait-il un RGPD-A : Un RGPD pour les métadonnées Audiovisuelles ?
Il nous semble que, oui, parce que les métadonnées audiovisuelles ont une importance capitale !
Mais encore…🤔
L’importance des données personnelles a été révélée par le RGPD (Règlement sur la Protection des Données Personnelles).
Même si la loi informatique et liberté est en vigueur depuis 1978, le RGPD a déclenché une véritable prise de conscience citoyenne et la confirmation que
- vos données personnelles vous appartiennent
- les responsables de traitement sont tenus par des obligations de transparence et de sécurité
- les responsables de traitement sont pénalement responsables en cas de non conformité
Fini (presque) le trading de données personnelles qui générait des millions de dollars et qui alimentaient, à votre insu, des algorithmes dont nous ne soupçonnons pas la puissance.
Mais l’enjeu de la protection des données personnelles est-il comparable à celui des données audiovisuelles ?
Pour répondre à la question tentons de mesurer l’importance des métadonnées audiovisuelles.
Les métadonnées audiovisuelles servent à décrire une œuvre audiovisuelle.
Plus précisément, il faut distinguer les métadonnées
- juridiques (propriété, gestion des droits d’auteurs)
- de contenu (titre, année de production, réalisateur, durée, genre, type d’œuvre, etc)
- d’enrichissement (photos, notes, commentaires, anecdotes, œuvres similaires, etc)
- d’analyse (signatures vidéos, signatures audio, description du contenu, etc)
- Une meilleure expérience utilisateur
Recommandation pertinente d’une oeuvre, recherche efficace, contenu enrichi - Des service innovants
Expériences interactives, informations multicanal en direct… - Identification des œuvres et rémunération des ayants droits
C’est ce dernier point nous intéresse davantage.
Un ayant droit perçoit une rémunération en contrepartie de l’exploitation de son œuvre…
À condition, bien sûr, que cet ayant-droit et son œuvre aient été correctement identifiés grâce aux métadonnées.
Le rapport de la mission Lescure publié en 2015 a ciblé 3 problèmes majeurs qui sont encore d’actualité :
- Il existe des standards internationaux (par exemple ISAN et ISNI) qui ne sont pas généralisés.
Ils permettent pourtant d’attribuer un identifiant unique et universel à chaque œuvre audiovisuelle ou chaque auteur/acteur.
Il faut préciser, cependant que des efforts et des avancées considérables ont été produits ces dernières années.
Par exemple, depuis 2017, le CNC participe uniquement au financement des projets de films ayant obtenu un numéro ISAN. - L’absence d’une base de données commune ou d’un système qui permet de publier et propager les modifications apportées aux métadonnées d’une œuvre.
Chaque acteur audiovisuel fonctionne en silo. Il façonne une base de données adaptées à ses besoins et une intercompatibilité est généralement trop coûteuse au regard des bénéfices espérés. - La qualité des métadonnées
Cette qualité (description correcte) est fluctuante et dépend fortement des moyens techniques et financiers dont disposent les acteurs. De plus, les problèmes de graphie, sont fréquents, surtout pour les films étrangers.
Est-ce si préoccupant ?
Oui. En considérant seulement la question éthique de la juste rémunération des ayants droits pour un travail risqué (la réussite n’est pas assurée) et longue haleine.
De plus, le chiffre d’affaires de l’industrie audiovisuel en France en 2015 est de 12 milliards de dollars.
Le chiffre d’affaires mondial du secteur de la télévision en 2018 est de 474 milliards de dollars.
Au-delà de l’aspect économique, l’industrie audiovisuelle participe au rayonnement culturel d’un pays et est génératrice de nombreux d’emplois.
Donc oui, l’enjeu est important.
Qu’apporterait un RGPD-A ?
La réaffirmation de principes cruciaux à l’égard des données audiovisuelles :
- Transparence (article 12 du RGPD)
Les ayants droits devraient obtenir simplement et rapidement des informations liées au traitement et à l’exploitation de leurs œuvres - Exactitude
Les données doivent être « exactes et, si nécessaire, tenues à jour » (article 5.1.d du RGPD).
Il incomberait aux détenteurs de données de créer des processus de rectification des données présentes dans leurs bases.
Exemple : comment suivre la vente de droits, la cession de droits, l’héritage, etc. - Droit d’accès, de rectification, d’objection (suppression) (article 15, 16 du RGPD)
Chaque ayant droit devrait pouvoir accéder aux métadonnées enregistrées et rectifier une information le concernant.
Une œuvre audiovisuelle étant un projet collectif, ce droit de rectification devrait s’exercer avec l’aval des autres ayants droits. - Sécurité des données (article 32 du RGPD)
Chaque responsable de traitement doit garantir la sécurité des données audiovisuelles qui lui sont confiées. Définir des procédures de recouvrement en cas de perte ou de modification accidentelle.
L’ayant droit devrait être informé le cas échéant. - La responsabilité (article 24 du RGPD)
Le responsable de traitement devrait pouvoir démontrer sa conformité avec ce règlement de données audiovisuelles, dans l’intérêt de l’auteur (des ayants droits).
Il permettrait également aux ayant droits de se réapproprier leurs données audiovisuelles, de participer pleinement à la protection de leurs droits et de pérenniser leurs rémunérations.